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Tribune | Les entreprises, grandes perdantes du Data Act européen

31.01.23
Thierry Hulot, président du Leem, est signataire d’une tribune publiée par Les Echos le 30 janvier sur l’Europe numérique.

Selon les signataires de cette tribune, les autorités publiques se félicitent du Data Act et de la stratégie européenne des données, mais en ont-elles mesuré toutes les conséquences ?

Les données jouent aujourd'hui un rôle clé dans l'économie et la société. Elles constituent un actif stratégique et économique pour les entreprises françaises. La valorisation des données et le retour sur investissement pour les entreprises sont donc fondamentaux dans un contexte de souveraineté et de compétitivité internationale.

Il est nécessaire d'encourager la mise à disposition de données d'entreprises utiles et exploitables, de permettre une meilleure répartition de la valeur des données et de rendre la maîtrise de leurs données personnelles aux individus.

Cependant, il ne faut surtout pas fragiliser la compétitivité des entreprises françaises et européennes en les contraignant à divulguer leur patrimoine informationnel, leur propriété intellectuelle ou leur savoir-faire.

Risques pour les entreprises et les particuliers

Avec le « Data Act », la Commission européenne sacrifie la liberté contractuelle des entreprises au profit d'acteurs non européens, sans réciprocité et sans tenir compte des risques industriels pour les entreprises ou des risques de sécurité pour les particuliers.

Comment empêcher les phénomènes d'ingénierie inversée (retro-engineering) permettant de copier un produit sans avoir obtenu les plans ni les méthodes de fabrication si les données stratégiques des constructeurs ou fabricants européens sont librement mises à disposition ?

L'analyse des données issues de capteurs installés sur les avions (pour contrôler les variations de température, l'utilisation du kérosène au cours d'un vol ou encore l'usure d'une pièce) qui sont utiles pour la maintenance des appareils pourrait par exemple permettre à un constructeur concurrent de comprendre le fonctionnement du capteur ou d'un composant de l'avion et d'en faire des copies sans en avoir la méthode de fabrication et de manière illicite.

Réglementation déséquilibrée

Il en résulterait également d'importants risques pour les individus puisque l'accès aux données pourrait conduire à des vulnérabilités sur des objets connectés, avec des enjeux de sécurité informatique et physique. Que se passerait-il en cas de cyberattaque (intrusion, prise de contrôle à distance, dysfonctionnement, etc.) sur des comptes bancaires, sur un véhicule autonome ou même sur le pilotage d'un avion ?

Il est primordial et urgent que les autorités européennes se rendent compte de l'impact réel de leur législation sur les données. Les fédérations signataires (représentant aussi bien industries que services) en appellent à revenir sur un principe volontaire du partage des données entre entreprises avec une base contractuelle, pour protéger le patrimoine informationnel des entreprises et leurs clients des dérives d'une réglementation déséquilibrée.

Les signataires :

Philippe Brassac, président de la Fédération bancaire française (FBF)

Thierry Cognet, président Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA)

Audrey Derveloy, présidente Fédération Française des Industries de Santé (FEFIS)

Guillaume Faury, président du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS)

Thierry Hulot, président de Leem, les entreprises du médicament

Henri Morel, président de la Fédération des Industries Mécaniques (FIM)

Geoffroy Roux de Bézieux, président du Mouvement des entreprises de France (MEDEF)

Laurent Tardif, président de la fédération des industries électriques, électroniques et de communication (FIEEC)