1er Observatoire de l’accès aux médicaments et de l’attractivité : la France, loin des meilleurs standards européens
Un bilan en demi-teinte. L’observatoire de l’accès aux médicaments et de l’attractivité de la France, mis en place par le Leem suite à la Loi de Financement de la Sécurité Sociale 2023, a livré ses premiers résultats. L’outil a été conçu dans un double objectif :
- Factualiser les éventuelles pertes de chance des patients français, en termes de disponibilité et d’accessibilité des médicaments ;
- Mettre en perspective le niveau d’attractivité du territoire par rapport à ses voisins européens.
Trois sources d’information ont été compilées : des données publiques, des études internes du Leem ainsi qu’une enquête réalisée auprès des entreprises du médicament.
Accessibilité et disponibilité des médicaments : une France en retrait
D’un côté, la disponibilité des nouveaux médicaments en France est significativement moindre qu'en Allemagne, en Italie ou en Angleterre, en partie en raison de délais de négociation plus élevés et de conditions économiques défavorables. À fin 2022, 34% des médicaments ayant reçu une autorisation de mise sur le marché au niveau européen entre 2018 et 2021 n’étaient pas disponibles en France, dont un tiers étaient toujours en cours d’évaluation ou de négociation.
En outre, les délais pour la mise sur le marché sont très éloignés de la cible de 180 jours fixée par la directive européenne Transparence, malgré une notable amélioration des délais d'évaluation par la haute autorité de santé. Hors situations critiques, les patients allemands, anglais et italiens bénéficient des médicaments plusieurs mois avant les patients français.
Les dispositifs d’accès précoce permettent d’accélérer significativement l’accès des premiers patients aux médicaments, avant l’évaluation du dossier par la HAS et la négociation de prix. Cependant, ces mécanismes sont réservés à des médicaments répondant à des critères stricts et aux patients dans les situations les plus critiques.
D’un autre côté, ces dernières années, les ruptures d’approvisionnement sur les médicaments courants se sont multipliées, mettant en jeu dans un tiers des cas des phénomènes de compétition entre les marchés. L’ANSM a enregistré entre 19 et 32 arrêts de commercialisation par an ces trois dernières années, dont la principale cause rapportée (60 % dans notre enquête) est la fragilisation de l'équilibre économique.
Un cadre réglementaire et budgétaire à refondre
L'industrie pharmaceutique en France est un secteur économique majeur, en perte de vitesse à l'international malgré des investissements importants dans la production et la recherche-développement. La France est distancée par ses pairs européens dans la production de nouveaux médicaments, en particulier les princeps biologiques, les génériques et les biosimilaires. Sur les nouveaux médicaments ayant obtenu une autorisation entre 2017 et 2022, seuls 48 sont produits sur le territoire français, contre 122 en Allemagne. Globalement, la France exporte de moins en moins les médicaments matures qu’elle produit et importe de plus en plus de produits innovants qu’elle ne produit pas suffisamment.
Les industriels français expriment leurs craintes, notamment du fait de la complexité et de l'imprévisibilité de la régulation et de la pression budgétaire croissante. 64% des répondants à l’enquête du Leem estiment que les dépenses de R&D devraient rester stables à l'avenir et 55% citent la complexité de la régulation comme le principal frein à leur développement.
À l’aune de ces résultats, l’appréciation de la France est claire : « Moyen. Peut mieux faire ». Certes, la situation du pays n’est pas catastrophique mais tout dépend de nos ambitions. Avec le Plan Innovation santé 2030, le Président de la République avait formulé en 2021 son objectif de faire de la France la première nation européenne innovante et souveraine en santé. Il y a encore du chemin à parcourir.
« Cette première photographie confirme qu’il y a une « urgence médicament » si l’on veut faire de la France la 1ère nation européenne innovante et souveraine en santé, conformément au vœu du Président de la République dans le cadre de la stratégie « innovation santé 2030 », souligne Thierry Hulot, président du Leem. « C’est pourquoi, nous attendons au plus vite les conclusions de la mission d’experts, nommée par la Première ministre Elisabeth Borne, sur le système de financement et de régulation des produits de santé. Et il faudra que les décisions budgétaires qui seront prises à l’automne dans le cadre du PLFSS 2024 soient en cohérence avec les ambitions affichées. Les entreprises du médicament y seront très attentives ».
À ce stade, l’Observatoire reste une photographie à un instant T. Les prochaines éditions permettront de monitorer les évolutions dans le temps de l’accès aux médicaments et de l’attractivité de la France. L’observatoire évoluera en continu pour intégrer de nouvelles dimensions d'analyse, à mesure de l'évolution des données disponibles et des besoins d’objectivation.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Contacts presse :
Stéphanie BOU – tél : 01 45 03 88 38 – email : sbou@leem.org
Virginie PAUTRE – tél : 01 45 03 88 87 – email : vpautre@leem.org
Alice ROZNOWIEZ – tél : 01 45 03 88 52 – email : aroznowiez@leem.org