Ces innovations qui prennent le cancer de vitesse
Une vague sans précédent de nouveaux anticancéreux vient enrichir l’arsenal de médicaments disponibles pour mieux traiter le cancer, et s’attaquer à des formes de cancer jusque-là sans solution thérapeutique. Plus de 70 nouveaux anticancéreux ont ainsi été autorisés ces 5 dernières années avec une proportion importante de thérapies ciblées, et 1 800 molécules en développement actuellement.
Cette accélération de l’innovation en cancérologie constitue une formidable opportunité pour les patients de bénéficier de nouveaux médicaments plus efficaces mais aussi un défi à relever par notre système de santé. C’est l’ambition de la plateforme de propositions que dévoile aujourd’hui le Leem : défendre le rôle pionnier de la France dans la recherche, l’accès et la diffusion de nouveaux traitements en associant dans une démarche partenariale les acteurs impliqués en cancérologie.
La révolution thérapeutique est déjà là, la révolution des esprits est en marche. Les nouvelles immunothérapies anti-cancéreuses révolutionnent profondément le paysage thérapeutique et cognitif de la cancérologie. La maladie cancéreuse n’est plus seulement une dégénérescence cellulaire anarchique, c’est aussi une défaillance du système immunitaire dans sa surveillance de l’organisme. La médecine devient plus personnalisée, puisqu’elle s’intéresse maintenant au système immunitaire de l’hôte plutôt que de se focaliser sur les caractéristiques de la tumeur.
Dans cette phase d’innovations en cascade, avec l’arrivée des immunothérapies, des thérapies géniques, cellulaires, le médicament doit être disponible rapidement pour des populations de mieux en mieux identifiées. Le continuum du développement clinique d’un médicament jusqu’à son intégration dans le parcours de soins des patients est plus que jamais un enjeu d’actualité. L’objectif de la plateforme des entreprises du médicament est donc de permettre à cette vague d’innovations de devenir une réalité thérapeutique pour les patients avec des propositions clés :
- Accompagner les nouveaux modèles de recherche, en raccourcissant les délais d’autorisation et de démarrage des essais cliniques et en favorisant des programmes de recherche autour de partenariats public / privé.
- Favoriser l’accès précoce des patients aux innovations, identifiées parfois dès la fin de la phase II, en réformant le régime des Autorisations Temporaires d’Utilisation (ATU) pour aller vers un mécanisme de « fast track » par indication.
- Adapter les méthodes d’évaluation en vue du remboursement en prenant en compte les données générées en conditions réelles d’utilisation, pour apprécier l’efficacité des traitements sur une population donnée.
- Utiliser des outils d’ « horizon scanning » pour anticiper l’arrivée des innovations et les conséquences en termes d’accès au marché du médicament et d’organisation des soins.
- S’appuyer sur l’arrivée des nouvelles approches thérapeutiques dans le parcours de soins des patients pour développer de nouveaux modèles de coordination des professionnels de santé.
« Nous devons mettre intégralement à plat le circuit d’évaluation et d’accès au marché du médicament. C’est un chantier que la France doit mener pour conforter son leadership en oncologie et son écosystème de recherche et de soins, et dans lequel, nous, industriels, sommes force de proposition et de concertation » déclare Patrick Errard, président du Leem.
L’innovation thérapeutique en oncologie est un modèle en profonde transformation, qui doit intégrer rapidement la complexité des maladies, des mécanismes d’action, des profils génétiques, des données… afin de répondre aux besoins des patients. « C’est l’un des dossiers que nous porterons lors du prochain conseil stratégique des industries de santé en juillet prochain. Il est aussi capital pour les patients de le faire avancer dans la perspective d’un futur Plan cancer », conclut Patrick Errard.
Les nouveaux médicaments font bouger les lignes.
Avec la compréhension des mécanismes participant à la transformation d’une cellule saine en cellule cancéreuse par mutations génétiques successives, la cancérologie est sortie d’une médecine d’organe pour s’orienter vers des thérapies spécifiquement dirigées contre les anomalies ou altérations moléculaires des cellules malignes. L’arrivée des thérapies ciblées au début des années 2000 signe l’entrée de la cancérologie dans l’ère de la médecine de précision avec pour conséquences
- la mise en place de nouvelles approches d’essais cliniques fondées sur l’identification de l’altération moléculaire,
- une part croissante donnée au dépistage de l’altération génétique ou du mécanisme moléculaire (biomarqueurs) en cause, pour identifier les patients susceptibles de bénéficier des traitements ciblés.
Les toutes dernières stratégies thérapeutiques – les immunothérapies – utilisent une autre cible, le système immunitaire naturel, afin de l’aider à détruire les cellules cancéreuses en stimulant les défenses du patient et en contournant les stratégies des cellules malignes, avec pour conséquences
- des solutions thérapeutiques pour des patients pour lesquels le récepteur de la réponse immunologique a été identifié, et donc des avancées dans des cancers jusqu’alors sans traitement efficace,
- des traitements plus faciles à supporter,
- une évolution vers une chronicisation de la maladie cancéreuse.
L’immunothérapie est une innovation de rupture qui bouleverse les protocoles classiques de soins fondés sur la radiothérapie, la chirurgie, la chimiothérapie et l’hormonothérapie, en permettant une autre combinaison de traitements :
- les séquences thérapeutiques se multiplient et s’adaptent à la situation de chaque patient,
- les stratégies thérapeutiques évoluent au rythme des découvertes et de l’espoir que font naître ces approches,
- les possibilités de combinaisons de traitements s’élargissent : sur le millier d’essais cliniques en cours dans le monde, une très large partie est consacrée aux combinaisons de traitements avec, des designs d’essais cliniques différents.
La conjugaison de deux phénomènes -une dynamique de recherche d’amont et une multiplication des essais cliniques sur des cibles- bouleverse le système global de développement des traitements, de leur évaluation et de leur prise en charge, qui ne correspond plus à la révolution thérapeutique en cours :
- les autorisations de mise sur le marché sont demandées pour des traitements comportant de multiples autres indications possibles (testées sur le plan clinique au fur et à mesure de l’identification des mécanismes biologiques associés à telle ou telle tumeur),
- par ailleurs, les options d’associations/séquences de traitement multiples remettent en cause les développements cliniques et l’évolution des prises en charge.