Interview de Laurence Peyraut – Prescription santé

Laurence Peyraut, vous avez été nommée Directrice Générale du Leem, en octobre dernier. Aujourd’hui, vous avez dépassé cette fameuse période souvent symbolique des 100 premiers jours. Mais avant de revenir sur ce à quoi vous avez consacré ces 100 jours, pouvez me dire, avec le recul, pourquoi, selon vous, le choix du Conseil d’Administration du Leem s’est porté sur votre personnes ?

Je pense qu’on ma choisit sur la base d’une ambition majeure que je m’applique à concrétiser désormais, à savoir valoriser tout ce que l’industrie pharmaceutique peut et doit apporter à l’économie de notre pays et la société…

Au-delà des entreprises et des équipes rencontrées, y a-t-il une donnée, un chiffre, un aspect qui vous a particulièrement surpris ?

Il y a un chiffre qui m’a profondément marquée, presque choquée. Vous le connaissez, vous en parlez souvent, mais je ne peux pas m’y résoudre : seuls 62% des français ont confiance dans les entreprises du médicament. Et ce alors qu’une proportion bien plus importante (77%) affirme sa confiance dans les médicaments…

Quel a été votre première démarche vis-à-vis de l’organisation collective et de ses dirigeants ? 

Cette question s’imposait à moi : Comment défendre le financement et la croissance d’un secteur dans un tel environnement, comment mettre en ordre de marche l’organisation collective pour affronter tous ces défis ? La journée du 16 janvier dernier a été essentielle dans ce cadre. Nous avons réuni les 40 membres du Conseil d’Administration pour réaffirmer collectivement que, quel que soit les modèles économiques présents autour de la table, nous sommes une famille d’industriels au service des patients…

Le premier dossier essentiel ne s’est-il pas imposé de lui-même ? Les pénuries ? 

Oui, c’est le sujet de notre souveraineté sanitaire. C’est en effet le premier pilier, le premier axe de notre stratégie. Sa première illustration, c’est effectivement la question des pénuries de médicament qui font si régulièrement la Une des médias. Sur ce point précis, nous avons fait le pari de la transparence et nous nous y tenons. […] Les entreprises ont toutes été particulièrement attentives et proactives en la matière : ainsi notre volonté de prévention s’illustre par la hausse des déclarations de tension : elles étaient un peu plus de 3760 en 2022 contre 4925 un an plus tard. Et justement : l’intensification des déclarations et l’identification des risques ont permis de réduire de 25% le nombre de pénuries effectives : elles étaient 988 en 2023 contre 1340 l’année précédente…

Là aussi, la solution, tout du moins en partie, n’est-elle pas au niveau européen ?

Evidemment, sur ce point aussi, c’est au niveau européen que nous parviendrons à résoudre durablement ce problème. Une fois encore, on ne peut pas imaginer des frontières qui n’existent pas pour se contenter de solutions strictement hexagonales. C’est pour cette raison notamment, que je suis très engagée dans les instances communautaires de notre profession.

Est-ce que le fameux bon usage du médicament n’est pas aussi constitutif de note souveraineté sanitaire ? Ce que le gouvernement semble penser d’ailleurs, si l’on en croit les premières piste quant au PLFSS 2025 ?

Nous devons reprendre la parole sur la question du Bon Usage du Médicament. […] Le sujet est d’autant plus essentiel que, nous le savons, 300 millions d’euros d’économies devront être réalisées sur les volumes dans le cadre du PLFSS […] On le sait, certaines populations sont particulièrement concernées : les personnes âgées pour lesquelles la consommation moyenne est de 9 médicaments par jour. Or, on le sait : au‐delà de 5 médicaments quotidiens, le risque d’un « cocktail nocif » est réel. Là aussi nous voulons prendre toute notre part à cette mission de santé publique…

Vous avez parlé de deux axes du bon usage ?

Le second sera une initiative à destination du grand public et des médecins qui pourrait démarrer dans les toutes prochaines semaines…

Également à votre agenda, l’accord cadre, pourquoi avoir prorogé le texte actuel ?

Parce que nous devons avoir le temps d’avancer clairement sur des dossiers essentiels. L’idée n’est pas de faire évoluer les choses à la marge mais bien de pousser le curseur du changement et de l’évolution aussi loin que possible. Nous souhaitons que le CEPS, avec lequel cet accord est signé, puisse prendre en compte l’ensemble des facteurs qui influent sur le prix de nos produits…


Je voulais pour conclure revenir sur ce projet que vous avez évoqué lors de vos vœux à la presse fin janvier, celui d’un baromètre complet, dit à 360°, de l’attractivité de la France…

C’est un excellent sujet de conclusion car il illustre parfaitement la méthode de travail que je souhaite mettre en place et respecter pour faire avancer tous nos dossiers. Je suis une adepte de la co‐construction, et cet outil en est un exemple parfait. Nous Sur souhaitons partager toutes les dimensions stratégiques de notre feuille de route, mettre à disposition toutes les données que nous collectons depuis des années au Leem et que nous collecterons encore demain, sur des sujets aussi divers mais complémentaires que sont la fiscalité, l’emploi, les essais cliniques, la transition écologique, notre image et notre réputation… Des données qui démontrent en effet que si la France est déjà un pays attractif, comme l’ont récemment attesté certaines annonces particulièrement spectaculaires, nous pouvons et devons l’être plus encore. Nous avons tous les arguments et les talents pour y parvenir.

Retrouvez en intégralité l’interview de Laurence Peyraut dans le dernier numéro de Prescription santé : Prescription Santé - Le Quotidien (prescription-quotidien.com)