Journée Mondiale de la lutte contre le sida : dimanche 1er décembre 2019
La prise en charge et la lutte contre le VIH/sida : des progrès majeurs au cours des deux dernières décennies
Depuis le début de l’épidémie, en 1981, le sida (syndrome d’immunodéficience acquise) est responsable de près de 39 millions de décès dans le monde. Pandémie majeure de la fin du XXe siècle, le sida est dû à l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), un rétrovirus qui détruit les cellules du système immunitaire et conduit à une sensibilité accrue aux infections et à certains cancers. Sans traitement, les défenses immunitaires des personnes séropositives, c’est- à-dire porteuses du VIH s’effondrent au bout de quelques années, conduisant celles-ci à développer le syndrome d’immunodéficience acquise. Cela peut entraîner à terme le décès du patient, en particulier si sa charge virale, c’est-à-dire la quantité de virus dans l’organisme, n’est pas contrôlée.
Les premiers médicaments développés contre le VIH (antirétroviraux) ont apporté leurs premiers espoirs pour les malades. en France, le premier médicament efficace a été commercialisé en 1987. il limitait notamment la réplication du virus, mais présentait des effets secondaires lourds. les années 1990 ont vu l’émergence de trithérapies, qui permettaient de faire baisser la charge virale dans le sang jusqu'à la rendre indétectable en ciblant différentes étapes du cycle viral. Ces trithérapies ont été une réelle avancée thérapeutique et ont permis de sauver un très grand nombre de patients, mais au prix de nombreuses contraintes de prise pour certains (à prendre toutes les quatre heures), d’interactions médicamenteuses majeures et d’effets secondaires importants (fatigue, maux de tête, troubles digestifs…).
Les innovations successives ont permis, au cours des deux dernières décennies, d’améliorer de façon considérable la prise en charge des patients séropositifs, grâce à des médicaments aujourd’hui plus efficaces, mieux tolérés et plus simples à prendre.
Ces innovations thérapeutiques, développées par les laboratoires pharmaceutiques, ont ainsi apporté de réels bénéfices pour les patients, notamment sur deux grands axes :
RÉDUCTION DE LA MORBI-MORTALITÉ
Depuis l’introduction des trithérapies en France, en 1996, l’espérance de vie des personnes séropositives a significativement augmenté de dix ans. De nos jours, les patients infectés par le VIH et traités rapidement ont une espérance de vie quasiment similaire à celle des personnes non infectées.
AMÉLIORATION DE LA QUALITÉ DE VIE
Alors que les premiers traitements nécessitaient une prise pluriquotidienne de plusieurs médicaments (environ une vingtaine de comprimés, dont certains devaient être conservés au réfrigérateur) et avaient de nombreux effets indésirables, les trithérapies modernes ont permis de réduire considérablement le nombre de prises (une ou deux par jour) et de comprimés par prise. les médicaments utilisés aujourd’hui sont à la fois plus efficaces et mieux tolérés que les médicaments de première génération. ils permettent ainsi une meilleure persistance — critère très important pour des patients voués à prendre un traitement tout au long de leur vie.
Par ailleurs, ces nouveaux traitements antirétroviraux associés à une charge virale indétectable dans le sang, ont réduit de 96 % le risque de transmission du virus à un partenaire sexuel non infecté.
De même, ces progrès thérapeutiques ont eu un impact positif en termes de santé publique :
LIMITATION DE LA PROPAGATION DE L’ÉPIDÉMIE
Les progrès thérapeutiques, couplés aux efforts de prévention, ont permis de contenir la propagation de l’épidémie. En effet, le nombre de nouveaux cas par an a fortement diminué grâce à la réduction de la charge virale permise par les trithérapies, passant de 3,5 millions de nouveaux cas par an dans le monde en 1996 à 2,1 millions en 2015 (voir graphique ci-dessous).
A noter toutefois que certaines régions restent plus touchées que d’autres, comme l’Afrique subsaharienne, où les comportements à risques ont peu diminué et où l’accès aux trithérapies reste limité. Des laboratoires pharmaceutiques tentent donc de mettre en place des programmes favorisant l’accès aux médicaments dans les zones défavorisées, certains en rejoignant par exemple le Medicines Patent Pool, créé par Unitaid, une organisation s'efforçant de rendre les outils diagnostics de haute qualité et les traitements vitaux plus abordables dans les pays à faible revenu.
AMÉLIORATION DE LA DIMENSION SOCIÉTALE
La prise en charge efficace des patients séropositifs permet désormais à ces derniers de mener une vie « presque» normale. Cela a conduit notamment à la limitation de l’absentéisme au travail, diminuant ainsi les coûts indirects liés à la maladie, ou encore à la possibilité pour les femmes séropositives d’avoir des enfants non porteurs du virus. La lutte contre les discriminations à l’égard des personnes vivant avec le VIH reste cependant un enjeu sociétal important.
ET DEMAIN ?
Aujourd’hui, 49 médicaments en développement contre le sida sont en phase d’essais cliniques : 25 antirétroviraux chimiques, 21 vaccins, et 6 autres biothérapies (protéines recombinantes, thérapie cellulaire…) (*).
Outre le fait que les nouveaux médicaments doivent générer toujours moins d’effets secondaires, deux défis majeurs sont désormais à relever, et guident les nouvelles pistes de développement thérapeutique :
-- Développer des traitements de longue durée d’action
Ce type d’antirétroviraux permettrait de diminuer considérablement la fréquence des prises de médicaments (une prise toutes les quatre voire huit semaines), d’alléger le fardeau d’une prise quotidienne, et de ce fait d’améliorer l’observance des patients et donc l’efficacité des thérapies.
Certains antirétroviraux à longue durée d’action sont en phase de développement clinique avancée (respectivement, en phase 3 et en phase 2).
-- Développer une guérison fonctionnelle
La piste la plus prometteuse pour éradiquer le VIH est actuellement le ciblage des cellules réservoirs dans lesquelles le VIH reste « dormant», échappant ainsi à la vigilance du système immunitaire et à l’effet des antirétroviraux. Une des techniques actuellement explorée est le « shock and kill», qui consiste à activer les virus dormants afin que les cellules infectées soient sensibles à l’effet des antirétroviraux. Des chercheurs français ont identifié un marqueur permettant de différencier les cellules dormantes des cellules saines, et qui pourrait être utilisé comme outil de diagnostic et de ciblage.
Autant de pistes qui redonnent espoir quant à la prévention, l’amélioration de la prise en charge, et peut-être bientôt, à l’éradication du virus.
(*) Extraction Evaluate Pharma, Décembre 2017, avec les critères/filtres suivants : Products status: active, Patent status: patented, Europe indication status (current): phase 1, phase 2, phase 3, indication level 3: HIV & related condition